À toi mon autre révolu,
Du futur, je t’observe confier ta dualité de janvier 2015 à notre journal en disant:
« Cher journal des émotions,
L’inspirant voyage parcouru au cours de cette année 2014 s’est achevé sur plusieurs notes marquantes. Malgré leur simplicité apparente, ces notes ont constitué pour moi de savoureux ingrédients à mon bonheur. Recevoir ma famille un 25 décembre, pour la première fois, fut un moment d’une grande charge émotionnelle. Un nouvel an également inédit est venu me combler et m’aider à commencer l’année du bon pied.
Au début de cette première semaine de janvier, me délecter de « l’ombre du vent », un chef d’œuvre de roman de Carlos Ruiz Zafon, planer à mon rendez-vous hebdomadaire de kizomba juste après des retrouvailles enjouées avec le plus jeune de mes neveux et ses parents, sont autant d’éléments qui m’ont fait dire à une amie que j’étais heureux comme un gosse. C’était le matin de ce premier mardi d’un mois qui fut marqué par une dualité de sentiments. Une dualité qui m’a sans cesse accompagné jour et nuit, m’a auréolé de paix et de calme, tout en m’abreuvant de stresse et d’agitation.
Souvent, lorsque je me sens dans l’état que je décrivis à mon amie ce mardi, j’aime plaisanter en disant que si je devais me retrouver face à l’épreuve la plus inquiétante, je lui sourirais et l’affronterais en toute sérénité. J’ai parfois l’impression que je pourrais faire de cet état de bonheur d’enfant, une armure imparable. Ce mardi après midi, après avoir appris la nouvelle qui nous attendait moi et mes collègues, j’ai compris que la mise en place de mon armure ce matin n’était pas un hasard.
Au cours de ma scolarité, j’ai étudié à mainte reprises ce phénomène qui n’a jamais cessé de se répandre. C’est une conséquence directe de l’expansion perpétuelle de la mondialisation. J’en ai souvent été un témoin lointain à travers les journaux. Il est souvent relaté à quel point ce phénomène de la délocalisation laisse en détresse ceux qui perdent leur travail après avoir passé parfois plusieurs décennies dans la même entreprise. Pour la première fois de ma vie, j’en ai été un témoin direct. Ce mardi après midi, nos responsables nous ont annoncé que notre service sera délocalisé en Pologne et aux Philippines. Mon dernier jour de travail sera le 27 février. À ce moment, j’ai un peu moins de deux mois pour me trouver un nouvel emploi. Mon état de bonheur d’enfant, procuré par ces ingrédients qui me sont chers, m’aida à digérer cette situation inédite dans mon parcours professionnel. C’est ainsi que j’ai pris la mesure du défi qui m’est proposé, et décidé de le relever avec sourire.
Ma préparation inconsciente pour accueillir cette nouvelle représente à mes yeux une énième preuve que rien n’arrive par hasard. Je me devais d’avoir confiance en l’avenir. Repenser à de multiples situations d’une apparence désespérée, et qui se sont dénouées en ma faveur de manière extraordinaire, m’a aidé à renforcer ce sentiment d’être entre de bonnes mains. Ces bonnes mains qui me comblent si souvent au delà de mes espérances. Convaincu que ma vie est un chef d’oeuvre écrit par le romancier suprême, Dieu, je me sentais en mesure de faire fonctionner à plein régime ces mécanismes qui me procurent la paix intérieure. Travailler sur les intrigues, les thèmes et les personnages de mon prochain roman, lire un chef d’oeuvre dont chaque paragraphe, chaque élément structurel me fascinent par leur poésie, m’envoler sur la piste de kizomba, et essayer de donner un sens au maximum de détails de mes journées, tel sont ces mécanismes qui constituent mon cocktail d’apaisement. Me délecter de ce cocktail m’aide à être un chercheur d’emploi serein.
Cette sérénité dans ma recherche s’est fissuré à chaque fois que je me suis rappelé d’un autre principe fondamental. Ce principe qui dit que penser que tout est acquis d’avance, c’est manquer d’humilité. Au cours de ces journées sans nouvelles offres aux quelles je puisse postuler, les doutes s’installaient dans mon esprit. Et la crainte de me retrouver sans emploi le soir du 27 février planait sur mes nuits. Puis, je me réveillais en me disant que douter c’est insulter la perfection des plans du romancier suprême aux commandes de ma vie. La minute suivante, je me rendais compte que l’humilité qui engendre ces doutes que j’essaye de chasser, est aussi une valeur chère à notre créateur. Alors comment trouver un équilibre pour cette dualité de sentiments ?
Cher journal des émotions, me voici à nouveau face à un paradoxe inextricable. J’espère au moins que ma démarche soit saine, et que je me pose les bonnes questions. Tant pis si je n’y apporte pas de réponse exhaustive dans l’immédiat. »
Cette confession sur la dualité qui t’habite en ce mois de janvier 2015 le confirme. Plusieurs versions de toi débattent dans ta tête. Je peux te rassurer. Du futur où je t’observe, nous sommes toujours plusieurs dans ma tête. Nous discutons sans cesse, en recherchant l’harmonie. Entre toi, mon révolu, et moi ton futur, je pense que si nous avons réussi à éviter la démence jusqu’à présent, c’est parce que nous apprenons à canaliser les énergies de chacune des versions de nous qui cohabitent en permanence. Aujourd’hui, la cerise sur le gâteau, c’est qu’il est possible de remonter le temps et d’observer en profondeur les pensées de nos versions révolues.
Jean
Une bonne lecon de relativisation.
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journaldesemotions
Oui, c’est le genre de péripétie qui m’a appris à dédramatiser les choses
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lyri gentle
La dualité entre nos certitudes et nos doutes…c’est sûrement elle qui nous pousse à faire les bons choix, sans même le savoir à l’instant T.
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journaldesemotions
Si nous relevons le défi d’équilibrer nos certitudes et nos doutes, nous pouvons en effet au moins nous diriger vers la certitude de prendre des décisions avec lesquelles nous pourrons vivre sereinement.
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