Cher journal des émotions,
Nous leur portons des regards bienveillants. Ils sont parfois de simples connaissances. Ils peuvent être nos amis ou notre famille. Ce sont les malades que nous croisons de près ou de loin. De temps à autre, nous pensons que nos efforts d’empathie nous permettent de comprendre ce qu’ils vivent. Jusqu’à ce que notre propre santé soit secouée. Avec notre vitalité bouleversée par une maladie grave ou une maladie saisonnière, nous pouvons constater les limites de l’empathie des personnes en bonne santé. C’est ce qui m’arriva en ce mois de février.
Une angine m’a foudroyé durant une semaine. J’ai réalisé que je ne comprenais pas les malades quand j’étais en bonne santé. Car malgré mes efforts d’empathie, je suis loin de m’imaginer qu’un malade puisse souffrir au point d’oublier ce que ça fait d’être en bonne santé. Pendant les dix jours passés à me tordre de douleurs, j’avais le sentiment de ne plus savoir ce que ça fait de courir et de recevoir ma dose d’endorphine, ce cocktail d’excitation apaisante. Mon amnésie était totale par rapport à l’idée de passer une nuit reposante et d’avoir la force de me lever aux aurores pour écrire. Car mon sommeil fiévreux me faisait commencer mes journées dans l’état de fatigue d’une personne ayant été battue pendant des heures. J’avais l’impression que les douleurs étaient présentes depuis une éternité. Pourtant ce n’était qu’une angine saisonnière. Ce genre de moment me fait penser que je suis incapable de comprendre les malades sans en faire partie. Et c’est un rappel de l’impératif de savourer sa bonne santé, quand on en a une. L’impératif d’optimiser la forme olympique que nous pouvons conquérir par la discipline. Cet oubli de ce que ça fait de ne pas être malade fut une occasion pour une belle piqûre de rappel.