Mes genèses

Le lendemain de mon anniversaire en avril 1994, j’ai échappé à la mort. Cet événement fut l’un des deux moments clés qui m’ont transformé. Au cours du Forum Landmark, un atelier d’intelligence émotionnelle auquel j’ai récemment participé, j’ai analysé en profondeur comment deux “genèses de mon identité” ont façonné ma vie.

Depuis le 7 avril 1994, rares sont les jours où je ne pense pas à la mort. Dès mon adolescence, l’écriture fut une thérapie essentielle. Avec mon anxiété quotidienne liée à la mort, vient une imagination développée. Les scénarios de mon éventuel décès étaient élaborés dans la tête du garçon que j’étais. L’écriture a permis de canaliser cette énergie créative pour donner vie à des poèmes, des romans et des essais. Ma passion pour l’analyse de tout ce qui m’entoure s’exaltée. Ma curiosité devint l’un des cadeaux les plus précieux que l’univers m’a offert. L’art de poser des questions existentielles m’est devenu vital.

Quelques années après la première genèse, ma curiosité au sujet de mes émotions m’a guidé au cours d’un tournant. À 12 ans, cette expérience fut la seconde genèse de mon identité. J’éprouvais des sentiments pour une fille qui a fini par sortir avec un de mes amis. Une personne qui était au courant de ma situation s’est inquiétée de l’effet que cette nouvelle allait avoir sur moi. C’est ainsi que j’ai compris que j’étais supposé être jaloux. Cela était loin d’être le cas. Voir ces deux personnes chères à mon cœur, former un magnifique couple fut réjouissant. Je trouvais qu’ils allaient parfaitement ensemble. Aucune frustration ne s’est manifestée en moi. J’ai réalisé que j’étais un être foncièrement différent de toutes les personnes que je connaissais. Car la pure joie que j’ai ressenti en apprenant la nouvelle, était l’opposé de la jalousie. Une fois adulte, j’ai découvert que ce bonheur singulier porte un nom: la « compersion ». Le garçon de 12 ans que j’étais aurait apprécié savoir que ce néologisme existe, et qu’il y a d’autres personnes qui éprouvent ce sentiment. Penser que j’étais bizarre de ressentir ce que je ressentais, m’a donné l’impression que je ne serai jamais compris.

Cette expérience m’a appris que ce n’est pas la foule qui dictera mes sentiments. Ma passion pour l’analyse et l’exploration de mes émotions s’est approfondie. Des ailes de liberté ont poussé en moi. Pendant mon adolescence, sans le savoir, j’ai développé une capacité à être libre des conditionnements liés à l’amour romantique. Mon intérêt pour les conversations profondes au sujet des émotions m’a conduit à créer plus d’amitiés avec des femmes qu’avec des hommes. Le raisonnement du patriarcat qui consiste à dire que l’amitié homme-femme n’existe pas, ne s’est jamais appliqué à moi. Aussi, j’ai évité de mettre l’amour romantique sur un piédestal par rapport aux autres types d’amour. Mes amitiés profondes ont une place si capitale dans ma vie que lorsque je n’ai pas de relation amoureuse, je reste comblé. Je ne souscris pas à cette idée que j’ai besoin d’un être pour me compléter. Je n’ai pas de vide en moi, je suis entier.

La compersion étant inhérente à mon être, cela s’est reflété dans mon orientation relationnelle. Ma conception de l’amour romantique est entièrement dénouée de l’idée de possession ou d’exclusivité. Pour moi, il n’y a pas de danger dans la possibilité qu’une femme avec laquelle j’ai une relation amoureuse, puisse en même temps avoir une relation amoureuse avec une autre personne. Aussi, l’amour entre moi et ma partenaire, n’est pas en conflit avec l’amour vécu simultanément avec une autre. Les deux amours sont complémentaires de la même manière que mes amitiés profondes s’enrichissent mutuellement. Avec mes partenaires en amour, nous nous créons des environnements sains dans lesquels nous nous sentons à l’aise pour être entièrement nous-mêmes. Les jugements et les tabous n’y ont pas de place. Dans ce contexte, chaque conversation difficile est accueillie à bras ouverts et représente une occasion de grandir. Nous ne laissons pas de frustrations macérer sans les disséquer verbalement ensemble. Notre capacité à nous apporter mutuellement du soutien émotionnel n’a pas de prix. C’est en partie ce qui fonde notre épanouissement, et constitue un élément clé dans mon expérience d’élévation en amour, qui se distingue de l’idée de tomber amoureux.

Avoir appris à écouter mon cœur très tôt dans ma vie m’a aidé à comprendre que je ne tiens pas dans certains moules. J’ai réalisé que la foule ne déterminera pas mon orientation relationnelle. J’étais polyamoureux longtemps avant de savoir que le mot « polyamour » existe.

English translation

Une réponse sur « Mes genèses »

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s