Être seul au milieu de la foule. Être seul au milieu des milliers de publications en ligne, de ses amis des réseaux sociaux. La solitude se décline sous diverses formes. Les analyses de cette souffrance occultent parfois une racine essentielle. Les peines de la solitude pourraient être engendrées par l’incapacité à savourer sa propre compagnie. S’accepter et s’approprier son identité requiert une connaissance experte de soi. Un trésor qui se capte et s’entretient avec patience et curiosité. Le mariage le plus important d’une vie est celui avec soi-même.
Chaque être est en couple avec lui-même. Le plus tôt on le réalise, le mieux on l’intériorise et le plus de chances on préserve pour que la relation avec soi-même soit épanouissante. Il devient alors pertinent de ne confier la mission du maintien de sa paix intérieure qu’à soi. Certes, d’autres personnes peuvent y contribuer, mais il semble essentiel de ne pas confier toutes les clés à une seule âme.
Face à la trahison, deux choix. Pardonner ou ne pas pardonner. Un carrefour déterminant pour une paix intérieure. Et si ce carrefour avait une troisième voie? Une voie où on s’affranchit de la notion de pardon. Avec cette approche, il ne s’agit pas de refuser de pardonner, mais de se dire qu’il n’y a rien à pardonner.
Pendant longtemps, j’ai souscrit à l’idée qu’il est impératif de pardonner pour avancer. Puis, j’ai réalisé que la notion de pardon peut s’avérer être une forme de prison. Que l’on pardonne suite à un acte de contrition ou non, la personne qui a heurté est mise au centre du chemin de guérison. Une fois le pardon acquis, certaines personnes s’offusquent à l’idée que la plaie puisse rester ouverte ou mentionnée. Voyant que le pardon ne cicatrise pas par magie, ma conviction est que seul le travail sur soi agit. Il est d’une efficacité remarquable. Une fois le pardon hors de l’équation, je respire mieux car je sais que tout le pouvoir de guérison est entre mes mains.
Contrôler les actions d’autrui est une ambition qui m’est étrangère. Mon approche se base sur le postulat que chaque être humain est intrinsèquement aimable et en quête de bonheur. Être animé par l’intention de nuire semble être un symptôme d’un profond malaise conscient ou inconscient. C’est le stigmate de la présence de troubles qu’on essaye d’éluder, en infligeant de la peine à autrui, pour ne pas ressentir celle présente en soi. À l’individu qui me cause du tort, je m’efforce de lui souhaiter de trouver les moyens et les outils pour se soigner. Sans rancune, malgré ma déception d’avoir été l’objet d’actions blessantes. L’énergie que j’aurais pu dépenser dans les méandres qui mènent à la décision de pardonner, je la consacre entièrement à soigner ma plaie. Cela passe par une observation attentive de mon état émotionnel. Ce qui mène à l’exploration des racines de ce que je ressens. Je finis par mettre le doigt sur ce que cette expérience douloureuse dit de moi. Un acte qui représente une avancée dans ma relation avec moi-même. Enfin, je peux déterminer comment je devrais désormais me protéger. Perfectionner ainsi une symbiose interne entre moi et moi-même, catalyse la création de liens profonds avec les autres. C’est l’avantage de ne pas errer avec un vide en soi, en espérant que quelqu’un daigne le remplir.
Le temps est la ressource la plus précieuse dont un être peut disposer. Une ressource qui ne se renouvelle pas. Le temps ne guérit pas non plus par magie, comme il semble communément admis. Attendre passivement que des blessures internes se referment, c’est courir le risque qu’elles infusent et infectent insidieusement sa vie et celle de son entourage. Traiter assidûment ces blessures est impératif pour atteindre un équilibre sain, terreau de la floraison des plus belles couleurs d’une âme.